Journal de bord de l'Harmattan
Tue, 17 Jan 2012 17:00:00 - 32° 04’E 28° 47’S
N° 410 - Faux dĂ©parts

18H00 en France, 19H00 heure du bord

Bonjour Ă  tous,

Il faut se rendre à l’évidence, il y a les vendredi 13 où tout va bien
et puis les mardi 17 oĂą tout va mal.

Tout commence par une nuit très difficile avec un mal de gorge
épouvantable qui m’empêche de dormir. Cela me tient depuis quelques
jours, mais cette nuit c’est l’apocalypse. Je n’arrête pas de tousser
et ne m’endors qu’au petit matin. Lorsque le soleil se lève, je suis
fatigué et n’ai vraiment pas envie de me lever.

Je sors tout de mĂŞme de ma couchette vers cinq heures, le temps de
m’occuper de moi et du bateau, je largue les amarres à 6h15. Il y a un
tout petit peu de vent qui tend Ă  Ă©loigner le bateau du quai. Mon
voisin, un américain, est levé et il me regarde partir sans même me
proposer un coup de main alors que c’est une règle de bienséance que
respectent tous les marins du monde. C’est encore plus vrai lorsqu’il
s’agit d’un navigateur solitaire.

Le bateau est prêt, le moteur tourne, je n’ai plus qu’à détacher les
amarres. Je saute sur le quai, enlève l’amarre avant et la jette sur
le pont puis je coure à l’arrière, j’enlève l’amarre et la jette sur
le pont. Le bateau est déjà à un mètre du quai, je saute dessus in
extrémis et envoie la marche arrière. Harmattan commence à reculer
puis j’entends un bruit bizarre à l’arrière. Je découvre avec horreur
que mon amarre arrière est retombée à l’eau et qu’elle s’est prise
dans l’hélice.

Que faire ? Je suis seul, je remets un tout petit peu de marche avant
pour me rapprocher du quai, le bateau se met en travers et en
bataillant un bon moment, j’arrive à l’amarrer à nouveau. Je suis
content de ne plus avoir mon cathéter dans le ventre car plonger dans
un port ce n’est pas très sain. Je n’ai plus qu’à enfiler un maillot
de bain, des palmes et un masque pour aller délivrer mon hélice.

Une bonne douche et je repars Ă  7h30 sans un regard pour mon voisin.
Je suis encore dans le port que je comprends que cela ne va pas le
faire. Moteur à fond, j’atteins à peine 2 nœuds et demi, 3 si le vent
pousse un peu. Le bateau semble extrĂŞmement lourd et je me pose la
question si je dois ou non continuer. Au Sri Lanka j’ai fait gratter
la coque par un plongeur (qui m’a d’ailleurs pris une fortune) en
grattant, il a enlevé tout l’antifouling et le bateau étant resté deux
mois ici, plus rien n’a empêché la faune et la flore marine de
coloniser ma coque et mon hélice.

Je décide tout de même d’essayer de continuer en me disant qu’avec le
courant je devrais arriver Ă  Durban oĂą je pourrais certainement
caréner.

Dans l’entrée du port, un bateau de pêcheurs vient à ma rencontre, ils
me disent que le « Port Contrôle » essaie de me joindre. Je vais à la
VHF et appelle. La petite dame n’est pas trop contente, elle me dit
que je dois demander l’autorisation, ce que je fais immédiatement.
Elle me demande le nom du bateau puis je dois attendre dans l’avant
port avec des vagues qui couchent le bateau d’un bord sur l’autre.
Après cinq minutes d’attente, elle me rappelle pour me dire « You can
proceed », je lui dis que je ne comprends pas, elle me répond « You
can go ». « Thank You » et je repars direction le large.

Les ennuis continuent, maintenant c’est l’électronique du pilote
automatique qui ne fonctionne plus correctement. Toutes les deux ou
trois minutes, le pilote se met en erreur et repasse en « Standby ».
J’insiste mais comme cela va en empirant et que je ne me vois pas
aller même à Durban ainsi, à 9 heures je décide de rebrousser chemin
et de rentrer au port régler ces problèmes.

En arrivant je file voir le chef des manutentionnaires pour lui
demander à quel moment on peut sortir Harmattan. Il téléphone et me
dit cet après midi. Par contre, comme il faut faire avec la marée, on
ne pourra le remettre à l’eau que lundi prochain. Je me dis que je
n’ai pas trop le choix et j’accepte. L’ouvrier qui s’occupe du trolley
va venir me voir en fin de matinée.

Je suis content mais comme d’habitude, il y a ce que promet le chef et
ce que peut l’ouvrier. La marée ne monte pas assez haut cet après
midi, il faut attendre lundi, mais il y a déjà un autre bateau sur le
planning et, du coup, il ne sera pas possible de sortir Harmattan
avant le 7 février ! Je suis catastrophé. L’ouvrier comprend mon
désarroi et me propose de faire intervenir un ami à lui qui est
plongeur pour gratter la coque comme au Sri Lanka.

Le plongeur arrive alors que je suis en pleine sieste. Il me propose
de faire cela pour 90€, ce que je trouve raisonnable. Il me demande
quand je désire faire cela. « As soon as possible », il me dit alors,
« The day after to morrow, wednesday ». Demain c’est mercredi. Quand
va-t-il venir ? Demain ou jeudi ? Peu importe, j’ai du boulot en
attendant.

Le problème du pilote est plus complexe à résoudre. Tous les
instruments du bord sont branchés sur un réseau, en parallèle. C’est
ce réseau qui ne fonctionne pas correctement. Le problème est que cela
peut venir de n’importe lequel des instruments connectés à ce réseau
mais également de n’importe quel endroit des 30 mètres de câble qui
courent dans le bateau.

Heureusement, j’arrive à retrouver le fonctionnement instable de
l’installation en étant à quai. Je fais de nombreux tests et je
démonte toutes les prises que j’asperge avec un produit « spécial
contacts » que j’ai eu la bonne idée d’emporter. J’y passe la fin de
matinée et toute l’après midi. Ce soir, tout semble fonctionner à
nouveau. Ce matin je n’avais que 2V sur le fil de donné du réseau, ce
soir j’ai 10,5V et je n’ai plus du tout d’instabilité. Je vais laisser
le pilote branché toute la nuit pour voir s’il tient le coup.

Ce matin, en rentrant dans le port à flot, j’ai croisé deux dauphins
qui Ă©taient venus faire un tour au milieu des bateaux. Ici, comme en
Asie, je ne vois pas de goélands, il y a très peu de mouettes mais
énormément de ces grands rapaces, un peu comme à Langkawi.

Voilà une journée qui se termine, je vais être rapidement au lit, je suis crevé.

A bientĂ´t

Jean Louis


"Hi Captain,

Que de péripéties...le coup de l'amarre ça met les boules surtout quand ton voisin de ponton ne daigne pas te prèter un minimum d'assistance...après la moto qui a aussi perdu cette solidarité on pensait que le monde de la navigation était le dernier bastion ou on entretenait encore cette entraide...espérons qu'il ne s'agisse que d'un seul exemplaire??
Pour le reste, j'imagine bien que ç'était chaud également et ça me rappelle un départ de Rhodes au moteur entre 2 et 3 noeuds...
Enfin comme dit Pierre Yves il vaut mieux sacrifier un peu de temps et Ă©viter le pire.
Dis nous si ton plongeur nettoyeur est venu faire son boulot??
J'espère aussi qu'entre temps tu as pu solutionner aussi ton problème pilote.
A te lire Captain,
Jacky"


Envoyé par Jacky Peudevin le 19-01-2012 à 11:09

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