Journal de bord de l'Harmattan
Mardi premier DĂ©cembre 2020 Ă  18h00 TU, 19h en France - A Cormeilles en Vexin
N° 1280 - Beaucoup de chance

Bonjour Ă  tous,

Cette nuit, vers trois heures et demi du matin, enfin une information « Urgent » défile sur l’écran de CNEWS. Jean Le Cam a pu récupérer à bord de son Imoca son concurrent Kevin Escoffier. Quel soulagement et surtout quelle chance pour ce marin. Nous sommes passés tout près de la catastrophe, vraiment tout près.

Comment un bateau peut-il se casser en deux, d’un seul coup, alors que les conditions météorologiques n’étaient pas réellement exceptionnelles ? Je m’interroge. Normalement les bateaux de plaisance, qu’ils soient de loisir ou de sport, doivent entrer dans une catégorie de conception. La catégorie A permet d’affronter des vents de force supérieur à 8 et de naviguer dans les zones les plus mal famées (« haute mer »).

Y aurait-il des passe-droits pour ces coureurs au large ? Les règles de conception sont-elles mal pensées ? Les contrôles sont-ils mal effectués ? Qui ne fait pas son travail ? Au départ du Vendée Globe il y avait deux grands favoris, Jérémie Beyou sur son Charal et Alex Thomson sur son Hugo Boss. Ces deux concurrents sont déjà hors course pour des avaries majeures alors que leurs bateaux n’ont fait que de naviguer sur l’eau ce qui est la fonction première d’un bateau. Ils n’ont pas rencontré de récif, ils n’ont pas percuté un autre bateau, ils n’ont fait qu’affronter la mer pour laquelle ils sont censés être conçus.

Maintenant c’est PRB qui se casse en deux dans une mer avec des creux de 5 mètres. Ce ne sont pas des conditions exceptionnelles, un bateau de classe A doit pouvoir affronter des conditions beaucoup plus mauvaises sans mettre en danger la vie de son équipage. Quelle chance a eu ce marin ! Son bateau a sombré quasiment instantanément. Heureusement il était équipé de deux radeaux de survie, un à l’avant et un à l’arrière.

Celui de l’avant s’est retrouvé immédiatement à 3 mètres sous l’eau et Kévin à pu mettre à l’eau le radeau arrière in extrémis. Il était déjà dans l’eau pour enfiler sa combinaison de survie et gonfler son radeau. Il n’a pas eu le temps de prendre des rations de survie. Le bateau a coulé tellement vite que c’est une énorme chance qu’il ne se soit pas retrouvé à la mer sans radeau de survie. Puis il a encore eu beaucoup de chance d’être retrouvé car dans des creux de 5 mètres un radeau est pratiquement invisible. Enfin il a encore eu de la chance de pouvoir monter à bord du bateau de Jean Le Cam car dans une mer aussi formée c’est très difficile et risqué.

Cette succession de chances qui a permis d’éviter le drame ne se renouvellera pas indéfiniment. Il me semble que les organismes concernés devraient réfléchir et trouver des solutions. Ce bateau était le troisième de la course, lorsqu’il a été lancé, il y a une dizaine d’années, c’était le bateau le plus « léger » de tous les bateaux de la même génération.

Comment ne pas s’étonner lorsque l’on constate que ces défaillances arrivent sur les bateaux les plus rapides de la course. Encore une fois, plus un bateau est léger et plus il est rapide. Mais pour être plus léger on a forcément rogné sur de la matière rendant la structure même du bateau plus fragile.

On parle sans cesse de rencontre avec des OFNI (Objet Flottant Non Identifié) comme si cela était exceptionnel et anormal. Mais la mer est remplie de troncs d’arbre à la dérive, de gros mammifères marins et d’autre déchets rejetés à la mer aux quatre coins du globe. Il n’est pas anormal d’en percuter, les bateaux doivent être conçus en prévoyant ces collisions.

Quelle différence avec la Formule un. Ce sport a su faire évoluer ses standards de conception d’une façon étonnante. A chaque accident des solutions ont été trouvées et imposées. Résultat, à ce jour malgré des accidents d’une violence inouïe les pilotes s’en sortent la plupart du temps. On l’a encore vu ce weekend avec la voiture de Romain Grosjean coupée en deux, le pilote sort d’une boule de feu après plus de 20 secondes d’angoisse pour les spectateurs. Cela devrait faire réfléchir la fédération nautique.

Pour l’instant les concurrents n’ont parcouru qu’un quart du parcours, espérons que les bateaux tiendront.

A bientĂ´t
Jean-Louis
Sommaire
Commentaire
Précédent
Suivant