Journal de bord de l'Harmattan
Samedi 28 Mars 2020 Ă  16h00 TU, 17h en France - A Port Saint Louis du RhĂ´ne
N° 1259 - Stress au SupermarchĂ©

Bonjour Ă  tous,

Je suis encore un peu fatigué mais les choses s’améliorent. Je suis totalement isolé dans mon bateau, totalement seul et je ne vois personne. Je ne risque donc absolument rien et cela me va bien. Malheureusement je dois me nourrir pour subsister et là, d’être à Port Saint Louis du Rhône n’est pas la bonne pioche. C’est une petite ville d’un peu moins de 9000 habitants, totalement à l’écart du monde, au fin fond de la Camargue.

Mis à part l’Intermarché, il n’y a aucune possibilité de Drive ou de livraison à domicile et en cette période de confinement ce supermarché à décidé de stopper ces services !!!! Il faut dire que sa taille est très inférieure à ce qu’il faudrait ici. L’équipe est très réduite, à titre d’exemple lorsque le téléphone sonne c’est une des caissières qui décroche. Et puis, avec le confinement, les restaurants et les cantines fermés, son chiffre d’affaire doit être en très forte augmentation.

J’ai essayé de repousser au maximum mes courses, mais ce n’est plus possible et, hier j’ai réussi à me motiver pour m’y rendre. La dernière fois, c’était avant le confinement, mon expérience avait été désastreuse et j’en était revenu totalement traumatisé. Pour être clair et vous décrire mon état d’esprit, je préfère mille fois affronter une forte tempête en haute mer que d’aller remplir un cadi à l’Intermarché en cette période de crise.

Je ne suis pourtant pas du tout hypocondriaque mais j’aime me battre contre un ennemi franc et que je peux respecter. Lorsqu’une énorme déferlante arrive elle prévient, elle fait un raffut d’enfer et on peut lutter, jouer avec. Mais ce virus de taille nanoscopique est sournois, lâche et vicieux. Il peut se trouver partout, aux aguets, prêt à nous piéger. Et puis on n’a pas le verdict immédiatement, il faut attendre une dizaine de jours pour savoir si l’on a été touché, c’est terrible.

Je suis donc dans cet état d’esprit en approchant du parking. J’ai bien pris soin de demander s’il y avait une plage horaire pour les « Vieux ». On m’a précisé que c’est entre 14 et 15 heures. Il est donc 14 heures précise lorsque je monte sur le parking. Première constatation pas très rassurante, le parking est rempli !!! Effectivement des affiches précisent que pour les personnes âgées c’est entre 8 et 9 heures, voilà comment est géré ce supermarché !

Ici les caddies ne sont pas désinfectés, je dois sortir du SHA (Solution Hydro Alcoolique) pour le faire moi-même. L’intérieur est noir de monde, les locaux sont petits, les allées étroites et beaucoup de femmes sont regroupées par deux ou par trois en train de discuter, bloquant les allées. Je n’aime pas du tout. Au rayon fruits et légume les gens prennent les fruits, les tâtent, les reposent. Un vieux tousse avec application sur les pommes et les bananes.

J’ai préparé une liste ordonnée qui tient sur deux colonnes d’une page A4. Je commence par ce qui craint le moins, les boissons, la droguerie … A un moment, je suis en train de prendre un sac de pommes-de-terre, une femme attrape mon caddie à pleine main pour le déplacer. Je suis sidéré. Un peu plus tard c’est une mégère qui le déplace. Je lance méchamment « Madame qui vous a permis de toucher à mon caddie ? ». « Il n’y a pas de problème Monsieur, regardez je porte des gants » me dit-elle avec un sourire en coin.
Quelle bêtise ! Les bras me tombent du corps. J’ai déjà évoqué le sujet dans les pages de ce blog, je trouve tout à fait anormal qu’on n’enseigne pas un minimum de biologie aux enfants et cela dès le plus jeune âge. La plupart des gens appliquent comme des rebots les consignes qu’on leur rabâche à la télé sans les comprendre, d’où la prolifération du virus.

Lorsque je ressors du magasin je me désinfecte les mains, je mets mes courses dans le coffre et range le caddie avant de me désinfecter à nouveau les mains avant de prendre mon volant. Une dame me dit, « ce n’est pas la peine, il y en a l’entrée du magasin ». Oui, c’est bien mais ici personne n’a compris qu’il doit également y en avoir à la sortie. C’est lorsqu’on ressort d’un endroit contaminé que les mesures de désinfection doivent être appliquées.

Lorsque je rentre dans mon bateau je laisse tout ce qui n’est pas à mettre au frais dans le coffre. Et lorsque je m’endors j’imagine avec plaisir tous ces petits virus, bleus de froid et claquant des dents avec leur couronne dorée sur la tête, se serrant les uns contre les autres et rêvant d’un confortable et douillet poumon de vieux à 37° et plus si affinité. J’ai décidé de ne faire aucun sentiment !

A bientĂ´t
Jean-Louis
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