Journal de bord de l'Harmattan
Tue, 19 Jun 2012 19:00:00 - 28° 14’W 30° 23’N
N° 510 - Les allures

21H00 en France, 19H00 heure du bord

Bonjour à tous,

Lorsque l’on fait le tour du monde par les tropiques, dans le bon sens, c'est-à-dire d’Est en Ouest, on reçoit en permanence le vent venant sur l’arrière du bateau. On appel cela des allures portantes.
C’est souvent très confortable et le bateau marche bien. La force du vent apparent dans ce cas est la différence entre celle du vent réel et de la vitesse du bateau. Cela permet d’atténuer fortement l’incidence des coups de vent. Les vagues, qui sont souvent dans le sens du vent, arrivent sur l’arrière et la progression est facilitée.

Il faut par contre éviter le plein vent arrière, allure où les voiles du bateau ne sont plus appuyées sur le vent, conséquence le bateau roule et cela peut vite devenir très inconfortable. La solution est alors de tirer des bords.

Lorsque le vent arrive sur l’avant du bateau, c’est une autre histoire. Le vent apparent est l’adition du vent réel et de la marche du bateau et cela peut vite devenir assez violent. On appel ces allures le près. Il y a le près serré, c’est lorsque le vent vient très sur l’avant, puis le près et enfin le près bon plein lorsque le vent vient beaucoup plus sur le travers. Dans tous les cas le bateau avance très gîté, souvent face aux vagues, rendant la vie à bord très inconfortable. Les équipages n’aiment pas naviguer aux allures de près.

Je me rends compte que depuis les îles Bijagos, au large de la Guinée Bissau, je navigue au près. Je n’ai jamais navigué si longtemps au près et finalement on s’habitue à tout. Lorsque le vent n’est pas trop fort, la vie à bord peut même être agréable. Bien sûr le bateau est « penché » mais on peut faire avec. Je n’utilise plus ma cabine avant, je dors dans la couchette du carré sous le vent. C’est un peu difficile pour la toilette et pour préparer les repas mais ce n’est pas insurmontable. J’ai oublié le repas pris dans une assiette, je mange directement dans la casserole, cela ne me pose pas de problème.

Ce midi j’ai fait cuire des pommes de terre coupées en petits morceaux dans une casserole. Celle-ci est fixée sur la gazinière à l’aide de pinces. Puis j’ai fait revenir deux tranches de lard dans une poêle où j’ai ensuite cassé deux œufs. Le temps qu’ils cuisent j’ai égoutté mes patates puis je les ai écrasées à la fourchette avec un peu de beurre directement dans la casserole. J’ai ensuite jeté dedans le contenu de ma poêle et je n’ai plus eu qu’à me régaler en tenant bien ma casserole par le manche pour qu’elle ne s’envole pas.

Depuis hier matin le vent, qui était stable depuis de nombreux jours, a entreprit une rotation lente dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Au fur et à mesure qu’il refusait, je mettais un peu plus d’Ouest dans ma route à tel point qu’hier soir le vent venait plein Nord et ma route était devenue WNW.

La météo prévoyait que le phénomène continue jusqu’à ce que le vent passe plein Ouest aujourd’hui en milieu de journée. Vers 19h30 hier soir, j’ai donc effectué un changement de bord pour repartir ENE.
Toute la nuit j’ai du continuer à suivre la rotation du vent en remettant du Nord dans ma route progressivement.

Une bonne partie de la nuit et de la matinée, le vent a soufflé en dessous de 7N et j’ai dû appuyer au moteur. Puis, vers midi c’est revenu entre 12 et 13N, plein Ouest, et depuis Harmattan file plein Nord entre 5 et 6 Nœuds. Un vrai régal !

Je sais que cela ne va pas durer, mais ce qui est pris n‘est plus à prendre et j’en profite. D’après la météo il va maintenant refuser en tournant lentement dans le sens des aiguilles d’une montre jusqu’à revenir plein Nord demain midi. Je vais devoir passer ma nuit à mettre de l’Est dans mon cap pour arriver ENE demain midi et changer de bord à nouveau.

Cette instabilité due à l’anticyclone tout proche n’est pas facile à gérer et ralentie considérablement ma progression. Maintenant je ne prévoie mon arrivée à Horta qu’en début de semaine prochaine si tout va bien.

La bonne nouvelle est la qualité de la réparation de mon génois qui a été effectué à la Marina de Mindelo. Je n’arrête pas de m’extasier sur le sérieux de ce travail. Il faut dire qu’après ce qu’avaient fait les petites mains des dentelières de Saint Hélène, il était facile de mieux faire.

Voilà, 117 Miles au compteur ces dernières 24 heures et tout de même
99 Miles de moins sur la route directe pour Horta à 488 Miles sur l’avant ce soir.

A bientôt.

Jean-Louis
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