Journal de bord de l'Harmattan
Mon, 25 Jun 2018 20:00:00 - 38°46’N 18°45’W
N° 1165 - Les oiseaux de mer

19h00 heure du bord, 20h00 TU, 21h00 en France


Bonjour Ă  tous,

Lors des longues traversées je peux rester des heures à observer le
vol des oiseaux de mer. Dans le grand Sud les albatros m’ont régalé.
Ici, entre les Açores et le Portugal, les puffins cendrés sont les
rois. Beaucoup moins spectaculaires que les albatros ils jouent tout
de même avec les vagues et c’est beau.

En fait ce que j’adore et ce qui m’a toujours ému ce sont les
trajectoires. Qu’y-a-t-il de plus beau que la ligne que forme une
trajectoire ? Ces lignes sont toujours d’une pureté parfaite et c’est
bien cette pureté qui rend joli un sein, une fesse ou bien une
silhouette de femme.

Pendant plusieurs années j’ai pratiqué le radio modélisme, j’étais
attiré uniquement par le vol des planeurs. Un planeur c’est exactement
comme un grand oiseau, il dessine des trajectoires magnifiques. Encore
une fois j’ai voulu atteindre des sommets dans cette discipline. Plus
le planeur est grand, plus il est lourd et plus la trajectoire est
belle car les petits planeurs peuvent être secoués par des
turbulences.

Dans ce domaine le K6 est pour moi le plus beau des planeurs, une
ligne rétro, un vol lent, une corde imposante au niveau de
l’emplanture, c’est un vieux planeur construit en bois. A titre de
comparaison c’est le Transal pour les avions à moteur. L’original
mesure 15 mètres d’envergure, j’ai décidé d’en réaliser un de 6,5
mètres !

J’ai commencé par dessiner les plans en me rendant à l’aérodrome de
Chérence qui en possédait un et en prenant toutes les dimensions. Puis
j’ai entamé la construction, deux années de travail en y consacrant
tout mon temps libre. Je l’ai réalisé en baguettes de sapin et en
balsa recouvert de tissus, chaque aile en deux parties. J’ai
thermoformé une bulle pour la verrière, qu’il est beau ce planeur !

J’ai dû tout inventer, réaliser d’énormes aérofreins, merci Monsieur
Leroy Merlin pour toute ta quincaillerie. Le problème est de le mettre
en l’air ! Terminé il pèse tout de même 33 kilos ! J’ai ainsi dû
réaliser un pylône moteur rétractable avec deux trappes par lequel
sort et rentre le puissant moteur Ă©lectrique.

La phase de mise au point a été captivante. J’ai inventé une énorme
catapulte. Un problème difficile à résoudre a été la solidité de la
roulette centrale car à l’atterrissage les forces peuvent être
importantes. Que je me suis régalé avec cette maquette ! Les vols
étaient si réalistes que lorsque je volais à Chérence les pilotes des
planneurs grandeur se posaient pour venir près de moi admirer la
réalisation et me donner des conseils.

Pendant que je vous écris cela Mark Knopfler est à la guitare, c’est
le très sublime « Sultans Of Swing ». Certainement un peu trop fort
mais je suis au milieu de nulle part, à 400 Miles des Açores et des
côtes du Portugal, qui cela dérange ? Le soleil est enfin apparu après
plusieurs jours de grisaille, Harmattan glisse sur une mer toute plate
Ă  6,5 NĹ“uds, des patates aux lards sont en train de frire sur le gaz,
bientĂ´t je vais casser dessus deux Ĺ“ufs, la charge Ă©motionnelle est Ă 
son maximum, que je suis bien ici, quelle est belle ma vie, c’est à
pleurer !

A l’heure où j’envoie ce post je suis à la moitié du parcours. Il me
reste 438 Miles pour atteindre l’entrée du fleuve Tage et je suis à
430 Miles de Praia Da Vitoria sur Terceira. Depuis 24 heures j’ai
gagné 121 Miles de route utile et mon compteur indique 127 Miles.

A bientĂ´t


Jean-Louis
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